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vendredi 22 août 2014

Un homme, ça ne pleure pas de Faïza Guène


L’histoire : Né de parents algériens, Mourad vit à Nice avec ses parents et ses deux sœurs. Pour Dounia, sa grande sœur, ça ne fait aucun doute : hors de question de finir mariée avec un « cousin du bled », femme au foyer et mère de cinq enfants. Ca Non. Dounia veut faire carrière ; et pour cela, elle est prête à tout écraser sur son passage, quitte à faire certains sacrifices..
Sa petite sœur Mina, quant à elle, suivra le chemin tout tracé par ses parents : petite fille modèle, elle épousera un honnête musulman avec qui elle aura trois beaux enfants et vivra une vie familiale traditionnelle et exemplaire.
Mourad, quant à lui, se retrouve coincé entre un héritage familial pesant et une culture différente de ses origines mais qu’il affectionne particulièrement.. Son pire cauchemar serait de devenir un vieux garçon obèse aux cheveux poivre et sel, nourri à base d’huile de friture par sa mère.
Mais comment arriver à se construire une personnalité lorsqu’on a deux cultures différentes ?

Ce que j’en pense : Alors là, c’est mon coup de cœur littéraire depuis le début de l’année 2014 !
Le livre de Faïza Guène est superbement écrit : elle se pose les bonnes questions, elle est drôle, réaliste, parfois cynique et c’est l’un des romans les plus originaux qu’il m’ait été donné de lire.
Les personnages du roman sont tous très attachants. J’ai beaucoup apprécié la mère : envahissante au possible, avec sa tendance à résoudre les problèmes par la nourriture en abondance, ses maladies imaginaires pour ne pas qu’on la contrarie, sa susceptibilité à fleur de peau et sa légère tendance à l’exagération.. Il y avait comme un petit air de déjà vu ! Même Dounia, qui va pourtant faire des choix radicaux dans sa vie trouve grâce auprès du lecteur à la fin du roman lorsque l’on gratte un petit peu la couche du personnage.
Faïza Guène a effectué un travail remarquable dans l’élaboration de ces personnages qui sont à la fois complexes, touchants et captivants.


L’auteure s’est identifiée à travers le personnage de Mourad qui reste celui qui a le plus les pieds sur terre parmi sa famille un peu loufoque. Mourad observe sa famille se déchirer puis se réconcilier ; il assiste à tous les évènements familiaux sans jamais prendre clairement parti, mais tout en étant doté d’une extrême sensibilité et d’un très grand sens de l’observation.
L’auteure veut attirer notre attention sur plusieurs points : les conflits entre les générations, la construction de soi lorsqu’on a une double-culture etc.. qui sont des sujets qui parlent notamment à ces enfants d’immigrés (dont je fais partie) et dont les parents sont venus s’installer en France avant ou à leur naissance.
Doit-on renier son héritage familial pour totalement s’intégrer ou au contraire le préserver à tout prix quitte à s’éloigner de la culture de notre pays d’accueil ? Que faire en cas d’incompatibilités ?
Voilà un roman qui mérite de faire parler de lui et à mon avis, on ne devrait pas tarder à avoir une adaptation sur grand écran.. Affaire à suivre..

Note : 4/5

Et pour finir, une petite citation : « Dounia plait parce qu’elle symbolise ce que la République fabrique de mieux : une réussite accidentelle. On adore ce genre de modèle d’excellence, grâce auquel on peut dire : « Vous voyez que c’est possible si on veut bien s’en donner les moyens ! ». Fastoche. Ça laisse donc supposer que les autres, une vraie bande de fainéants, bien au chaud, n’ont pas tellement envie de réussir dans la vie ».

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